Imagia: révolutionner le monde médical à l’aide de l’IA

L’histoire d’Alexandre Le Bouthillier

Vendredi 5 avril 2019
Grâce aux mégadonnées et à l’intelligence artificielle (IA), Imagia aide les professionnels de la santé à transformer le processus de dépistage et le traitement de pathologies comme le cancer.

D’après les données d’un rapport produit en 2017 par la Société canadienne du cancer et trois agences gouvernementales canadiennes, près d’un Canadien sur deux recevra un diagnostic de cancer au cours de sa vie — c’est d’ailleurs la principale cause de décès au pays. D’où l’urgence de trouver des solutions pour prévenir le cancer et pour mieux traiter les patients qui en seront atteints.

Tel est l’objectif d’Imagia, l’entreprise créée en 2014 par Alexandre Le Bouthillier et Nicolas Chapados qui mise sur l’intelligence artificielle pour maximiser l’efficacité des techniques de dépistage de telles pathologies et pour permettre au monde médical d’accélérer la mise au point de nouveaux traitements. Evidens, la plateforme créée par Imagia, utilise les algorithmes d’une technologie brevetée appelée Deep Radiomics pour produire, à partir d’images numériques, des biomarqueurs (c’est-à-dire des indicateurs qui permettent de mesurer les processus normaux ou pathologiques liés à une intervention thérapeutique) de manière à déceler l’apparition d’une maladie chez un patient ou d’en constater l’évolution. 

À titre d’exemple, lorsqu’un patient atteint d’un cancer se voit offrir deux traitements aux taux de réponse similaires, il peut être difficile de déterminer lequel peut s’avérer le plus efficace. « C’est là qu’intervient l’IA, explique Alexandre Le Bouthillier. Nous utilisons les données d’imagerie numérique à grande échelle pour quantifier les réponses de patients et fournir de l’information précise aux professionnels de la santé. » Grâce aux techniques mises au point par Imagia, le dépistage pourrait être plus rapide, moins invasif et moins coûteux.

Faire figure de précurseur grâce à l’IA

Alexandre Le Bouthillier a commencé très tôt à s’intéresser à l’entrepreneuriat et à l’intelligence artificielle. À l’âge de 18 ans, il a fondé sa propre entreprise d’informatique, et c’est sans surprise qu’il a étudié dans ce même domaine. Peu de temps après avoir obtenu sa maîtrise en informatique à l’Université de Montréal et entrepris un doctorat, il a cofondé, avec Louis-Martin Rousseau et Jean-François Gagné, la société Planora. Celle-ci, spécialisée en optimisation d’horaires de personnel, faisait appel — bien avant l’heure — aux données générées par l’IA. « À l’époque, l’IA n’était pas vraiment à la mode, affirme-t-il. Mais nous avions l’intuition qu’elle nous permettrait de résoudre plusieurs problèmes de logistique pour répondre aux besoins des entreprises tout en prenant en compte les préférences d’employés. » Le logiciel de planification d’horaires conçu par Planora s’adapte à des secteurs aussi variés que l’agriculture, le commerce de détail et le transport aérien.
 

En 2012, quand l’entreprise a été achetée par RedPrairie, une société américaine spécialisée en gestion et en optimisation de stocks, du transport et de ressources humaines, Alexandre Le Bouthillier s’est demandé quel nouveau défi l’attendait. « Je me suis dit que je pourrais me recentrer sur un domaine qui pourrait avoir des retombées positives sur les gens. Comment appliquer les récentes percées de l’intelligence artificielle au milieu médical? » Le déclic qui s’est opéré est aussi lié à une affaire personnelle, puisque l’entrepreneur a appris que son père était atteint d’un cancer du pancréas.

« Je me suis dit que c’était l’occasion d’utiliser l’IA afin d’améliorer la vie des patients et des professionnels de la santé. »

Alexandre Le Bouthillier

Démontrer son potentiel avec des preuves tangibles

Pour Alexandre Le Bouthillier, il faut faire ses preuves rapidement pour être en mesure de convaincre ses pairs du bien-fondé d’une idée. Dans le cas d’Imagia, un partenariat noué avec le fabricant japonais Olympus a rendu possible la prédiction de pathologies associées à des polypes photographiés lors d’une endoscopie. Cette collaboration a vite attiré l’attention et offert à Imagia les moyens de ses ambitions. Elle collabore maintenant étroitement avec des sociétés pharmaceutiques et des fabricants d’équipements médicaux afin d’intégrer l’immense agrégat de données de patients dans le processus de traitement et de découverte. 

Pour être entrepreneur, il faut non seulement de la passion, mais aussi de la persévérance. « Ce n’est vraiment pas du 9 à 5, avoue Alexandre Le Bouthillier. On passe des nuits blanches, on voyage à l’étranger pour voir ce que font les concurrents ailleurs dans le monde et pour se renseigner sur la manière dont on peut se démarquer. Il faut se maintenir à flot, lire et se documenter, ne jamais cesser d’apprendre. La détermination et la constance, ce sont deux qualités essentielles pour assurer la réussite de son entreprise. » Le succès repose aussi en partie sur l’équipe. « Il faut savoir reconnaître ses forces et ses faiblesses, s’entourer de ceux et celles grâce auxquels on pourra se hisser vers le haut, faire appel à des personnes à qui on ne ressemble pas forcément afin de multiplier les points de vue. »

Concentrer l’expertise en IA, un atout indéniable

Selon Alexandre Le Bouthillier, les entrepreneurs sont très bien soutenus au Québec et au Canada pour la recherche et le développement. « Il y a un climat sain parmi les investisseurs qui aident les entreprises à différentes étapes de leur croissance en proposant du financement. » Récemment, Imagia a emménagé dans le complexe O Mile-Ex, un centre d’excellence en intelligence artificielle qui a ouvert ses portes en 2018 et dont l’objectif est de créer un véritable écosystème d’entrepreneurs et de chercheurs universitaires pour favoriser leur collaboration dans un même lieu. « Ça crée un milieu très dynamique. La proximité de professionnels en IA a un impact qualitatif considérable sur la recherche et le développement de solutions. » 

Dans le commerce d’entreprise à entreprise, Imagia se distingue justement par sa concentration d’expertise en IA, qui est plus élevée que dans bien d’autres sociétés de grande taille avec lesquelles elle fait affaire. « Il s’agit de développer des partenariats entre des clients et des entreprises en démarrage comme Imagia qui ont décidé de se consacrer à l’innovation, mais qui ont besoin d’alliances pour concrétiser leurs idées », déclare Alexandre Le Bouthillier. Pour le cofondateur d’Imagia, la prochaine étape consiste à tisser des liens de plus en plus serrés avec des partenaires, aussi bien ici qu’à l’étranger, puisque dans le milieu médical, les joueurs sont souvent internationaux. « Pour nous, c’est une question de temps. Il faut patienter avant d’assister à l’aboutissement de nos travaux avec nos différents partenaires mondiaux, mais notre approche est d’emblée mondiale. D’abord parce que c’est nécessaire dans notre milieu, et ensuite parce que ça représente bien la visée de nos efforts. »

Imagia en chiffres

50 : le nombre de chercheurs spécialisés en intelligence artificielle employés par l’entreprise

94 : le degré de précision (en pourcentage) d’un prototype d’Imagia utilisé pour la classification de polypes d’un cancer du colon

2019 : l’année durant laquelle un premier appareil utilisant la technologie mise au point par Imagia devrait être mis en marché

3 millions : le montant d’un prêt accordé par le gouvernement du Québec par l’entremise du programme BioMed Propulsion afin d’encourager le développement et la commercialisation des avancées d’Imagia

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Visitez le site Web d’Imagia.