AYOS diagnostic : le diagnostic moléculaire au service des agriculteurs

Le billet de Chloé Dussault-Benoît

Mardi 27 octobre 2020
Chloé Dussault-Benoit est l’une des deux fondatrices d’AYOS diagnostic. Cette entreprise a pour but d’aider les producteurs de soya à tendre vers des pratiques agricoles plus durables en leur offrant un service de diagnostic rapide et personnalisé pour l’une des maladies responsables des plus grandes pertes de production chaque année. Un tel service n’étant pas encore disponible dans le secteur de l’agriculture, les deux jeunes entrepreneures comptent bien devenir une référence en matière de diagnostic des maladies des cultures dans les prochaines années.

Le désir d’avoir un réel impact 

Du plus loin que je me souvienne, j’ai toujours été passionnée par l’agriculture, la biologie et la recherche. En finissant mon baccalauréat en agronomie, j’avais le désir d’avoir un impact concret sur le quotidien des agriculteurs. J’ai donc choisi de continuer mes études à la maîtrise en phytopathologie (science qui étudie les maladies des plantes) afin de pouvoir aider les agriculteurs dans la gestion des ravageurs. Je n’avais cependant encore aucune idée à ce moment-là que mon projet de maîtrise lui-même allait me permettre d’avoir l’impact que je souhaitais dans le milieu agricole.

L’étincelle de départ

Mon projet de maîtrise, développé en collaboration avec une étudiante au doctorat, Geneviève Arsenault-Labrecque, avait pour but de créer un outil de diagnostic moléculaire pour la détection précise et rapide des différentes souches d’une maladie importante qui s’attaque aux cultures de soya. Alors que j’amorçais la deuxième et dernière année de ma maîtrise, mon directeur de recherche a déposé une demande de brevet afin de protéger la technologie en développement. C’est alors à ce moment-là qu’on nous a dit : « Pourquoi ne pas commercialiser vous-mêmes la technologie? » À cet instant précis, l’idée s’est incrustée dans ma tête et ne l’a jamais quittée depuis. Cependant, je n’aurais jamais deviné que j’allais échanger mon costume de scientifique pour celui d’entrepreneure!

Notre premier plan d’affaires en poche, élaboré grâce au soutien de SOVAR, un organisme qui facilite la transition d’innovations du laboratoire au marché, nous avons participé à plusieurs concours, tel que Génies en affaires de l’Acfas, dont nous avons remporté le deuxième prix du jury. Ce concours nous a permis, entre autres, de nous faire connaître, nous et notre projet d’entreprise, et de faire critiquer notre plan d’affaires de façon constructive par des professionnels. Ce concours nous a aussi permis d’élargir notre réseau de contacts en faisant la connaissance d’entrepreneurs de tous les milieux. Cette aventure enrichissante m’a bel et bien confirmé que nous avions une bonne idée d’entreprise : AYOS diagnostic. L’année dernière, notre entreprise a été sélectionnée pour la cohorte 2020 de l’Académie entrepreneuriale ULaval-CDPQ, qui offre des formations intensives à des entrepreneurs en démarrage.

Un aperçu de notre technologie

AYOS diagnostic, c’est tout d’abord une entreprise qui souhaite offrir un service de diagnostic aux producteurs de soya afin de détecter, grâce à des tests, la présence éventuelle de souches d’une des maladies qui causent le plus de dommages aux cultures : la pourriture phytophthoréenne. Notre outil de diagnostic identifie avec précision certains gènes du champignon qui causent la maladie, gènes qui diffèrent d’une souche à l’autre pour ce même champignon. Grâce à l’identification des différentes souches, nous pouvons savoir quelle variété de soya résistera à la souche présente dans le champ du producteur et formuler des recommandations pour le choix de la variété qui lui permettra de diminuer les pertes de rendement causées par la maladie.

Le concept est très semblable à celui du virus de la grippe et de son vaccin. Il existe plusieurs souches du virus, et nous devons les identifier avec précision afin de savoir exactement quel vaccin donner à la population pour éviter qu’elle développe la maladie. À ce jour, des tests aussi précis et rapides ne sont tout simplement pas accessibles aux agriculteurs. Nous tenons donc une formule de test qui pourrait révolutionner le diagnostic des maladies en agriculture et, déjà, il est possible, grâce à l’outil, d’effectuer des centaines de diagnostics dans les champs infectés au Québec et ailleurs au Canada.

Des collaborations bénéfiques

Parallèlement à la réalisation de mon projet d’entreprise, je poursuis la R et D dans un laboratoire de l’Université Laval afin d’optimiser notre outil. Je me considère chanceuse de pouvoir profiter d’un accès aux meilleurs équipements. C’est toute l’entreprise qui en bénéficie. Par ailleurs, nos liens étroits avec le laboratoire de diagnostic en phytoprotection du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec ainsi qu’avec un important fournisseur de semences au Canada nous ouvrent la voie vers de futurs clients.

D’ici le lancement de notre service prévu en 2021 à l’échelle du Canada, plusieurs étapes restent encore à franchir : l’incorporation, la négociation de l’utilisation de la licence du brevet avec l’Université Laval et l’obtention du financement nécessaire au fonds de roulement initial.

Nous envisageons également de diversifier notre offre de services en mettant au point des tests pour différentes maladies qui s’attaquent au soya, mais aussi à d’autres cultures agricoles. Nous souhaitons ainsi faciliter la vie des producteurs agricoles du monde entier dont les cultures sont affectées par des maladies en concevant des outils de diagnostic moléculaire et en rendant ceux-ci accessibles sur le marché international.

En terminant, j’encourage tous les étudiants qui souhaitent aussi se lancer dans l’entrepreneuriat à participer au concours Génies en affaires de l’Acfas. L’appel de candidatures en cours se termine le 28 janvier 2021.

En couverture, de gauche à droite: Geneviève Arsenault-Labrecque et Chloé Dussault-Benoit