SSENSE: révolutionner l’univers de la mode
L’histoire de Firas Atallah
Ayant toujours rêvé de démarrer sa propre entreprise, Firas Atallah décide d’étudier en gestion quelques années après l’arrivée de sa famille au Canada. Le jeune homme d’origine syrienne travaille ensuite pour une institution bancaire, tandis que ses deux frères Rami et Bassel poursuivent leurs études en génie informatique et en mécanique. L’aventure entrepreneuriale des trois frères commence lorsque Rami Atallah réussit à revendre sur Internet un jeans Diesel issu d’une collection particulièrement rare. Il entrevoit ainsi le potentiel inexploité de la vente en ligne, tout comme Firas et Bassel Atallah. Ensemble, ils se lancent dans les affaires en créant, en 2003, leur propre entreprise, qu’ils appellent SSENSE.
Au cours des premières années, Firas Atallah investit tout son temps et toute son énergie dans la croissance de l’entreprise, et il apprend énormément en cours de route. « Notre entreprise était en démarrage, et cela m’a forcé à approfondir mes connaissances dans tous les aspects de la vente au détail et en ligne », se souvent le chef des finances de SSENSE. Cela signifie, entre autres, approfondir sa connaissance du paysage de la mode grâce à des études de marché et à des analyses FFPM (forces, faiblesses, possibilités, menaces) et trouver des façons de permettre à l’entreprise de se distinguer de sa concurrence tout en conservant une structure de bas prix jusqu’à ce que le modèle ait fait ses preuves et devienne rentable. « J’ai eu la chance de m’associer à mes frères, et nos expertises et compétences complémentaires nous ont aidés à réussir. »
À l’époque, c’est le début du cybercommerce, qui compte alors très peu de joueurs, puisque les entreprises sont réticentes à pratiquer cette forme de commerce. Mais les trois frères sont persuadés que l’expérience de magasinage peut se décliner sous plusieurs formes. « Nous avions du mal à nous procurer des marchandises, raconte Firas Atallah, alors nous avons ouvert un magasin traditionnel dans le Vieux-Montréal afin de percer dans l’industrie et de tisser des liens solides avec nos fournisseurs. Nous avons dû surmonter plusieurs défis, mais nous avons persévéré et réussi, notamment grâce aux relations que nous avons établies avec nos partenaires. » En 2006, les frères Atallah inaugurent officiellement leur plateforme de commerce en ligne.
SSENSE souhaite rendre le luxe plus accessible à une nouvelle génération de consommateurs. L’objectif est de se positionner à contre-courant des marques de luxe traditionnelles, qui dégagent une impression de froideur hautaine. « Il y avait un manque d’innovation dans le monde de la mode de luxe, remarque Firas Atallah. Tous les détaillants semblaient avoir le même modèle d’affaires et une approche axée sur les ventes. » L’entreprise désire briser ce cadre rigide, d’une part, en s’associant aussi bien à des griffes parmi les plus convoitées dans le monde, comme Prada et Balenciaga, qu’à des marques de streetwear (des vêtements qui allient les styles sportif et urbain) et, d’autre part, en soutenant les créateurs émergents.
Par ailleurs, SSENSE crée du contenu pour fidéliser sa clientèle et pour exercer une influence culturelle forte dans le monde de la mode. « Nous défions les conventions et les normes de l’industrie — qu’il s’agisse de changer la perception qu’on a du luxe ou d’introduire un nouveau modèle de commerce de détail, déclare l’homme d’affaires. Nous avons été capables d’assurer la croissance de notre entreprise de façon durable tout en veillant à ce qu’elle demeure une société privée rentable, sans faire appel à du capital extérieur. Nous sommes fiers que notre entreprise soit établie à Montréal, qui est maintenant un leader mondial dans l’industrie de la mode. » Résultat : SSENSE est devenue une marque en soi; elle possède un style et un caractère bien définis que l’on ne retrouve chez aucun autre détaillant en ligne.
L’équipe et la clientèle de SSENSE sont composées à près de 80 % de jeunes âgés de 18 à 34 ans, ce qui influence considérablement les décisions des fondateurs. « Ce sont des personnes passionnées par la mode, qui se tiennent toujours à l’affût des tendances de la mode, de la musique et de l’art », affirme Firas Atallah.
« Nous avons conçu SSENSE comme une plateforme, poursuit-il, afin de donner une voix à ceux et à celles qui font évoluer la culture, qu’il s’agisse des designers que nous soutenons ou des artisans que nous mettons en valeur dans notre contenu informationnel. »
Firas Atallah
Et les chiffres parlent d’eux-mêmes : le nombre moyen de visiteurs mensuels de la plateforme SSENSE est passé de 1 million en 2010 à 13 millions aujourd’hui, et le nombre d’employés à temps plein de l’entreprise de 90 à plus de 600. SSENSE expédie ses marchandises dans plus de 136 pays et offre un service à la clientèle en anglais, en français, en japonais, en mandarin et en cantonais. « La croissance, et plus particulièrement la croissance durable, réside dans la prise de risques mesurés et dans de bons investissements, explique Firas Atallah. Il s’agit de créer une marque forte, de défier les conventions, de développer une entreprise axée sur la performance, mais aussi d’attirer et de maintenir en poste les meilleurs talents, tout en réfléchissant à une stratégie à long terme. »
Récemment, les trois frères ont fait appel à la firme de l’architecte renommé David Chipperfield afin de concevoir un nouveau concept de boutique, qui vient tout juste d’ouvrir ses portes dans le Vieux-Montréal, à quelques pas du lieu où tout a commencé. Selon Firas Atallah, la boutique reflète l’esprit même de l’entreprise, qui se caractérise par la fusion harmonieuse de l’expérience de magasinage en ligne et hors ligne. Les clients peuvent ainsi passer une commande sur le site Internet de SSENSE, puis prendre rendez-vous avec l’un des stylistes de la marque pour essayer les vêtements en magasin.
SSENSE ambitionne maintenant d’étendre sa présence à l’international, à la fois en profitant du numérique et en s’implantant physiquement à l’étranger. L’entreprise s’intéresse aussi aux nouveautés technologiques, notamment aux façons dont les mégadonnées et l’intelligence artificielle peuvent transformer la vente au détail. « Le plus important, c’est de rester passionné par ce que l’on fait, conclut Firas Atallah. Il faut admettre ses échecs, apprendre de ses expériences, ne jamais abandonner et toujours regarder vers l’avant. » Et c’est sans doute ainsi — de fil en aiguille — qu’on réussit à enchaîner les succès.
SSENSE en chiffres :
76 : le pourcentage de la clientèle appartenant à la génération Y
Plus de 400 : le nombre de marques de luxe vendues sur SSENSE.com
Plus de 20 000 : le nombre d’articles inscrits au répertoire de la boutique en ligne
53 millions : le nombre de pages du site SSENSE.com consultées chaque mois
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Visitez le site Web de SSENSE.
Photos : Alex de Brabant (portrait) et Dominik Hodel (boutique).